dimanche 9 septembre 2012

Le Festival de Deauville a fermé ses portes

© Marie Serre
C'est avec grande classe et glamour que le 38e Festival de Deauville a célébré le cinéma américain une dernière fois hier soir. Après avoir rendu hommage à l'homme d'action Liam Neeson, venu présenter Taken 2 (critique à suivre) vendredi, c'est à la bomba latina Salma Hayek que la soirée de clôture était consacrée, avant la projection de Savages, nouvelle œuvre d'Oliver Stone. Une soirée sous le signe du rire, de l'émotion, de la simplicité malgré les paillettes et de l'amour du cinéma indépendant américain.




Retour sur le palmarès

Un premier prix a été remis à Rachid Djaïdani pour Rengaine, film coup de poing sur le racisme entre les communautés à travers l'histoire d'une maghrébine qui veut épouser un noir. Mais l'un de ses 40 frères refuse cette union avec un "négro" mais aime en douce une juive : une fiction survitaminée et maîtrisée, née de neuf ans de travail.




© Marie Serre
C'est avec une certaine surprise que le prix du jury revient à Una Noche, premier film de la britannique Lucy Mulloy, coproduit par les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et Cuba. Ce long-métrage examine avec noirceur et authenticité la société cubaine d'aujourd'hui sur fond de misère, de trafic et de sexe. Un film peu optimiste, réalisé avec des maladresses narratives et de rigidité scolaire, mais sauvé par sa justesse, sa véracité et son audace.






Donné un peu en catimini (le lauréat étant reparti à Paris), le prix de la critique internationale revient à The We and the I, la chronique adolescente et énergique de Michel Gondry qui suit des lycéens du Bronx dans un bus scolaire, de l'excitation collective à la mélancolie individuelle.
© Marie Serre
Et le grand gagnant de cette soirée s'appelle Benh Zeitlin. Déjà ovationné et récompensé par la "Caméra d'or" à Cannes cette année, et souvent repris comme exemple par deux personnalités des plus influentes aux Etats-Unis, à savoir Oprah Winfrey et Barack Obama, Les Bêtes du sud sauvage ont enthousiasmé à l'unanimité les jurys de Deauville. Le premier film de ce jeune (presque) trentenaire new-yorkais remporte ainsi le Grand Prix, présidé par Sandrine Bonnaire, ainsi que le Prix de la Révélation Cartier, présidé par Frédéric Beigbeder. L'actrice française a tenu à remercier le réalisateur avec ces mots : "Quand le cinéma est beau, quand les films sont beaux comme le vôtre, ça rassemble." 

© Marie Serre






© Marie Serre
Est ensuite venu le temps de l'hommage à Salma Hayek. Vêtue d'une robe noire classique et élégante que la belle mexicaine a descendu les marches de l'immense salle du CID avec grâce et légèreté. Une fois sur scène, visiblement émue (sans larmes cette fois, contrairement à la conférence de presse donnée l'après-midi même - bientôt ici), elle a remercié la France, pays qui "a une place particulière dans son cœur" pour "lui avoir donné les deux plus beaux cadeaux au monde, l'amour et la maternité, du bonheur et votre générosité car vous m'avez donné le cadeau de la reconnaissance et du respect de mon travail".
© Marie Serre
Et après de nombreux remerciements d'usage, elle a rendu grâce à "l'adversité", les difficultés par lesquelles elle est passée pour en arriver là, les petits rôles qu'elle a dû interpréter pour enfin avoir le droit à en incarner de plus importants, comme celui de Frida, qui l'a consacrée. Et de terminer en disant que sa "carrière n'est pas la plus glorieuse du monde, mais elle a été une belle aventure, et je suis vraiment heureuse d'avoir incarné le moindre petit rôle qui m'a été offert". Une dernière déclaration qui sonne comme la fin d'une carrière, mais qui est en réalité celle d'un désir de pause dans le métier de comédienne, moment qu'elle a évoqué plus tôt dans l'après-midi.





Clap de fin... L'heure du bilan


© Marie Serre
Ce 38e Festival aura été marqué par une sélection montrant les vérités du monde actuel : une société américaine sombre, triste et sans joie, où les adolescents sont livrés à eux-mêmes sans autorité parentale, où les adultes n'arrivent plus à s'insérer dans la société, sans repères ni références, où le bien et le mal ne sont plus différenciés. Une Amérique perdue, en proie à des addictions, mais qui prend conscience de son mal-être. Sous des apparences de grande farce, God bless America (interview et critique ici sous peu) de Bobcat Goldthwait est un virulent plaidoyer contre la bêtise, la vulgarité et la méchanceté véhiculées par la télévision qui reflète et amplifie les travers d'une société en perte de valeurs. Dans Compliance de Craig Zobel (interview ici sous peu), une responsable d'un fast-food humilie une collègue sur la base d'un simple appel téléphonique, sans le moindre discernement. Smashed de James Ponsoldt (critique à venir) montre une jeune femme qui prend conscience des ravages que provoque son alcoolisme dans sa vie et fait tout pour s'en sortir. 
© Marie Serre
Quant à California Solo de Marshall Lewy (critique à venir), il explore la lourdeur de l'administration américaine et ses inepties en matière d'immigration. 
Plusieurs films explorent le malaise de ce pays via les relations à autrui. Dans Francine de Brian M. Cassidy et Melanie Shatzky, une quadra s'entoure d'animaux à sa sortie de prison à défaut de savoir créer des liens avec ses semblables. Avec son superbe Robot & Frank, le réalisateur Jake Schreier explore la relation que tisse un vieil homme isolé avec une machine intelligente. Dans Ted  (interview de Mark Whalberg sous peu) de Seth MacFarlane, gros succès au box-office américain, un homme lié depuis tout jeune à un ours en peluche vivant refuse de grandir... Mais Les Bêtes du sud sauvage nous réconcilie avec la nature humaine; ce film offre avec générosité ce qu'il y a de plus beau : l'entraide et le partage. Une fin de festival sous un ciel d'optimisme, cela ne se refuse pas.

© Marie Serre


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