mardi 4 septembre 2012

Critique : The Secret : Ne laissez pas traîner vos enfants (05/09/12)


THE SECRET (Avant-Première à Deauville)

De Pascal Laugier
Avec Jessica Biel, Jodelle Ferland, Stephen McHattie, William B. Davis

Cold Rock est une petite ville à l'abandon depuis la fermeture de la mine. Frappée par le chômage et la misère, elle voit ses enfants disparaître les uns après les autres, sans aucune explication. Une rumeur se répand... Le légendaire "Tall Man", créature indéfinie vivant dans les bois serait responsable de leur kidnapping. Mais les plus pragmatiques et terre-à-terre comme Julia Dening, jeune infirmière, veuve et maman, n'y croient pas. Et pourtant, son propre fils va se faire enlever sous ses yeux...

Pascal Laugier, le plus américain des réalisateurs français, revient avec une histoire de Boogieman après avoir s'être fait la main dans le genre horrifique avec le fadasse Saint-Ange et le très discutable Martyrs (pourtant esthétiquement réussi). Son retour sur grand écran laissait planer quelques doutes...
Si la bande-annonce et le synopsis restent concentrés sur la première partie du film, c'est pour une bonne raison. Il ne m'appartient pas de vous spoiler le reste car l'intrigue réserve suffisamment de surprises et de coups de théâtre pour que le spectateur ne présage rien de ce qui va arriver, jusqu'à une conclusion qui reste... potentiellement polémique.

Ce thriller psychologique est plutôt décevant malgré une volonté d'installer une climat paranoïaque, de blâmer les faux-semblants, et de suggérer que, finalement, l'humanité est capable du pire et de l'impensable. On s'attendait à un film flippant dans le fin fond du trou des Etats-Unis (ce qui est plutôt vraie dans la première partie du film) et on se retrouve avec une fable moralisatrice sans subtilité.

Laugier dessine une trame complexe où légende et réalité s'entremêlent, et dans laquelle il impose ses idées et sa vision d'un monde noir et poisseux. C'est dans cette atmosphère rude et glauque que le spectateur avance avec un certain malaise. Mais pour nous y conduire, il utilise des ressorts maintes fois repris : le grincements du plancher, le néon qui grésille, l'orage tonitruant, le bruit sourd des battements d'un cœur, une forêt perdue dans la nuit et ses cris d'animaux invisibles... Si on s'attend à ce que le méchant déboule à certains moments, Laugier réussit tout de même à faire surgir l'horreur là où on ne l'attend pas, jouant des twists, attendus ou surprenants. Mais ses qualités d'auteur se voient réduites dans une production américaine calibrée (même s'il transgresse parfois quelques codes de narration), trop sage et didactique, qui donne à l'ensemble un charme sans réel piquant.

Et pour autant, The Secret a une vraie force si on se donne la peine de s'accrocher et de prendre à bras le corps la fin du film, qui se pose comme une véritable question posée au public, comme une explication de tout ce qui se trame avant. Laugier manipule le spectateur, donnant son point de vue dans une scène cruciale démontrant que l'homme n'est ni bon ni mauvais, mais qu'il fait ce qu'il peut pour faire mieux. Mais vraiment moral mais toujours paradoxal, le cinéma de Laugier nous prouve que même les tortionnaires ont aussi un cœur. A nous de l'accepter... ou pas.

Pascal Laugier
© 
Marie TvCinephage
En résumé : Pascal Laugier a déclaré que ce film était l'un de ses "plus personnels tant il lui tient à cœur" et qu'il "aimerait qu'il reste dans nos têtes un moment après la fin" face à une salle bondée à Deauville. Rien n'est moins sûr... The Secret joue sur l'ambigüité des bonnes intentions mais ne sera pas considéré comme renversant et indélébile dans notre mémoire.

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