samedi 18 janvier 2014

[Critique] Minuscule : des petites bêtes captivantes (29/01/14)

MINUSCULE, la vallée des fourmis perdues


De Thomas Szabo et Hélène Giraud
(film animé)


© MMXII Futurikon FilmsLors d'une journée d'été ensoleillée, des fourmis noires vivent paisiblement dans une vallée, à la recherche de provisions en tout genre. Finissant par trouver les restes d'un pique-nique, le bataillon d'ouvrières transporte tout ce qu'il peut. Leur plus grande découverte ? Une boite à sucres, le plus grand des trésors, mais aussi le plus convoité. Les fourmis rouges, pires ennemis des noires, se mettent en rang pour dérober ce doux Saint Graal. Mais c'est au côté d'une coccinelle à la détermination sans faille que les fourmis noires vont se battre et tenter de garder leur or blanc.


© MMXII Futurikon FilmsVous, qui avez tendance à écraser les fourmis qui vous chatouillent le cou ou les doigts de pieds en vacances, vous ne regarderez plus ces petites bêtes rapides et besogneuses de la même façon après avoir vu Minuscule, la vallée des fourmis perdues. Adapté d'une série de courts-métrages de quelques minutes diffusés à la télévision, le film de Thomas Szabo et Hélène Giraud est une jolie surprise pleine de poésie bucolique et burlesque et d'aventures épiques. Ses créateurs ont gardé toute la magie des programmes courts : l'absence de dialogues remplacés par des bruitages cartoonesques, des gags dignes de Tex Avery, mâtinés de Charlie Chaplin et de Buster Keaton, et des personnages animés tendres et attachants au cœur de paysages réels (extérieurs et intérieurs) magnifiques. Les parcs des Écrins et du Mercantour nous laisse des images de carte postale.


© MMXII Futurikon Films
Pour ceux qui connaissent la série, ils risquent d'être un peu déroutés au départ avec le choix des personnages. Les fourmis, insectes secondaires à la télévision, deviennent les personnages essentiels de ce long-métrage, au détriment d'autres personnages plus emblématiques de la série. Mais des caméos sont au programme : les araignées (ici représentées à la manière de Tim Burton) ou encore la sauterelle. Mais ce n'est qu'un détail. 

© MMXII Futurikon FilmsL'ensemble se détache totalement de la série pour se forger une identité propre. Pas besoin d'être un fan pour tomber sous le charme de ses insectes et de leurs aventures périlleuses, sarcastique, voire même cruelle parfois. On peut légèrement regretter la sensation du passage du court au long-métrage, où des sketchs s'enchaînent pendant 1h30 avec quelques soucis de rythme de temps en temps, donnant une impression de freinage au mauvais moment.
© MMXII Futurikon Films
Mais ceux-ci sont vite oubliés lorsqu'on s'arrête avec attention sur la qualité de la mise en scène, de sa force visuelle et graphique minutieuse (comme la maison de l'araignée dans les égouts), avec une mise en relief 3D qui prend tout son sens et sa place pour plus de vitalité. Sans oublier l'ingéniosité des situations, où les objets du quotidien des humains deviennent un véritable challenge pour les petites pattes et ailes des insectes. Les nombreux niveaux de lecture laissent aux parents le loisir d'apprécier les références et les clins d'œil tandis que les enfants apprécieront les scènes de course-poursuite dignes de Star Wars (entre la coccinelle et les odieuses mouches, par exemple).

En résumé : Visuellement captivant, des personnages à croquer (ou presque…) et une absence de dialogues qui renforce la poésie et les émotions. Une vraie réussite à la française !

mercredi 15 janvier 2014

Les super héros invités aux Oscars


Les "héros du cinéma" seront à l'honneur lors de la la 86e cérémonie des Oscars le 2 mars prochain. Ils constitueront le fil rouge "divertissant et émouvant" de la soirée, ont annoncé mardi les producteurs de la soirée. Après la dominante  musicale (et peu amusante) de l'édition 2013, les producteurs Craig Zadan et Neil Meron, déjà aux commandes l'année dernières, ont choisi d'"unifier la soirée avec un thème divertissant et émouvant", expliquent-ils dans un communiqué. "Les gens, dans le monde entier, vont au cinéma pour être inspirés par les personnages qu'ils voient à l'écran. En rendant hommage à toute la gamme de héros qui ont enrichi notre expérience de spectateurs, nous espérons créer une soirée pleine de plaisir et de joie", écrivent-ils.

Ces héros pourront être aussi bien des personnages historiques que des super-héros, des héros populaires ou animés, d'hier et d'aujourd'hui. "Et cela inclut aussi les cinéastes et les acteurs qui prennent des risques et nous stimulent avec des sujets provocants et des personnages audacieux", précisent les deux producteurs.
Craig Zadan et Neil Meron, spécialisés dans les comédies musicales pour grand écran - on leur doit notamment Chicago, Footloose et Hairspray - ont été (étonnamment) reconduits cette année à la tête de la soirée après les bons résultats d'audience recueillis l'an dernier. La soirée avait pourtant été diversement appréciée par les critiques, globalement déçus par la prestation du présentateur, le cinéaste et scénariste Seth MacFarlane, à la limite de se prendre un gros carton rouge pour des propos déplacés, voire injurieux, sous prétexte d'être insolent.
Cette année, c'est la très populaire animatrice de télévision Ellen DeGeneres qui animera la soirée, et "évidemment, ça ne manquera pas d'humour", assurent les producteurs. "Il y aura peut-être aussi quelques surprises musicales en chemin". Les nominations aux 86e Oscars seront annoncées jeudi matin, avant la remise des statuettes le 2 mars au Dolby Theatre, à hollywood.

(avec AFP)

lundi 13 janvier 2014

[Critique] Les Brasiers de la colère : La descente aux enfers sans retour (15/01/14)

LES BRASIERS DE LA COLÈRE

De Scott Cooper
Avec Chritian Bale, Casey Affleck, Woody Harrelson, Sam Shepard, Willem Dafoe, Zoe Saldana, Forest Whitaker

Sortie le 15 janvier 2014


À Braddock, ville ouvrière de Pennsylvanie sombre et sur le déclin, les habitants s'enfoncent peu à peu dans la pauvreté. Rusell Baze, comme beaucoup d'autres, courbe l'échine et travaille à l'usine, où il laisse peu à peu la santé, et son âme. Après avoir passé un temps en prison suite à un accident de voiture fatal qu'il a causé sous l'influence de l'alcool, il essaie de retrouver une vie normale aux côtés de son frère cadet Rodney. Celui-ci militaire de carrière toujours entre deux missions au Moyen-Orient vit de paris et de jeux qui l'endettent toujours plus. Il se retrouve mouillé dans une sombre affaire de combats illégaux dirigés par le caïd du coin, Harlan De Groat, sociopathe en puissance et vicieux jusqu'à l'os. Jusqu'au jour où Rodeny disparaît mystérieusement... Russel part à la recherche de son frère, mettant de côté la peur et la loi.


Pour sa deuxième réalisation (après le remarqué Crazy Heart), Scoot Cooper embarque les spectateurs dans un drame au décor noir et poisseux d'une Amérique fragilisée, dont la gloire passée est réduite à néant. Un personnage à part entière. Sa population ? Oubliée mais indispensable au bon fonctionnement de la région, si mal considérée, se tuant littéralement à la tâche avec des métiers nocifs et mal payés (le titre en VO est tout de même Out of the Furnace). Une misère à laquelle elle semble s'être habituée. Le titre du film ? Une référence appuyée aux Raisins de la colère de Ford et de Steinbeck ?! Pas de quoi faire rêver à priori ! 

 © Metropolitan FilmExportLe réalisateur offre une mise en scène classique et dépouillée, sobre et élégante malgré le contexte, appuyée par une photographie sublime. Les nuances légèrement cuivrées donnent un style naturel et organique et des contrastes ombragés subtiles sur les personnages. De quoi envelopper parfaitement le sujet : celui d'une quête et d'une vengeance.
Seul bémol : les quelques métaphores filées, sont expliquées dans les grandes largeurs avec de nombreux plans didactiques, au cas où on ne comprenne pas le message que le réalisateur veut nous faire passer (comme cette biche tuée à la chasse mise en parallèle avec Rodney, aux mains de Harlan De Groat). 

© Kerry hayesLe casting 5 étoiles (et des producteurs qui ne le sont pas moins : Leonardo DiCaprio et Ridley Scott... excusez du peu !) tient ses promesses. Il brille avec des rôles principaux de caractères bâtis pour eux, et dont l'interprétation est sans faille. Christian Bale et Casey Affleck, ces deux frères à la relation conflictuelle, donnent de leur personne, autant physiquement que verbalement, passant de la férocité animale à la faiblesse d'un nouveau-né. À l'image de la ville et de ses hauts-fourneaux. Woody Harrelson est terrifiant de brutalité. Dommage que le junky féroce qu'il incarne manque de nuances...

 © Metropolitan FilmExportCependant, tout n'est pas si parfait pour considérer Les Brasiers de la colère comme un grand film. Si on entre en empathie avec les personnages, on croit à leurs souffrances, leurs blessures et leur désarroi grandissant pendant le film, le scénario déçoit. Il n'offre rien de nouveau, et l'ensemble donne l'impression d'un drame américain avec ses grandes étapes "obligatoires" sans originalité. On voit arriver de loin la scène de la vengeance, dont la finalité pose l'éternelle question "Doit-on se faire justice soi-même". Thème récurrent et récemment porté à l'écran dans Prisoners. Si le fond est classique, il offre quelques jolis moments de tension, mais il lui manque ce petit truc en plus qui aurait pu faire de lui plus qu'un beau film. 

En résumé : Il manque ce supplément d'âme pour faire des Brasiers de la colère un drame aussi profond qu'esthétique.


71e édition des Golden Globes : entre paillettes et surprises


La soirée des Golden Globes 2014, organisée par l'Association de la presse étrangère à Hollywod (HFPA), a débuté avec le traditionnel  défilé sur le tapis rouge des plus belles tenues des stars. Et par le feu d'artifices de blagues des présentatrices de la cérémonie, les comédiennes Tina Fey et Amy Poehler, comme l'année dernière. Les deux trublions de la soirée s'en sont pris une fois de plus à Taylor Swift, mais ont aussi raillé le beau Leo DiCaprio sur ses nombreuses liaisons avec des femmes plus jeunes que lui... L'une des meilleures saillies a été inspirée par le film Gravity, dans lequel George Clooney et Sandra Bullock jouent deux astronautes à la dérive dans l'espace. "Gravity est l'histoire de George Clooney, qui préfère partir à la dérive dans l'espace plutôt que de passer ne serait-ce qu'une minute avec une femme de son âge", a ironisé Tina Fey devant une salle hilare. Ambiance !


American Bluff s'est imposé dimanche comme le grand vainqueur des 71e Golden Globes, avec trois récompenses, tandis que 12 years a slave (la critique ici sous peu) a sauvé l'honneur in extremis avec son unique trophée de meilleur drame, malgré sept nominations.
La cérémonie a également distingué Leonardo DiCaprio pour Le loup de Wall Street et Cate Blanchett pour Blue Jasmine, alors que les rêves de trophées français se sont évanouis avec les échecs de La vie d'Adèle et de Julie Delpy.

American Bluff, le thriller aussi brillant que loufoque de David O. Russell (la critique ici sous peu), s'est adjugé le trophée de la meilleure comédie et a distingué ses deux actrices principales, Jennifer Lawrence (second rôle) et Amy Adams (actrice de comédie). La première, robe blanche et lèvres rouge sang, avait déjà remporté l'an dernier le Globe de la meilleure actrice de comédie pour Happiness Therapy, également signé par Russell. "Je tremble tellement. Ne me faites plus jamais ça, cela fait trop peur. Merci, merci !" a déclaré l'actrice de 23 ans. Amy Adams, 39 ans, qui transforme l'essai pour sa cinquième nomination, a quant à elle remercié Russell pour "écrire des rôles aussi formidables pour les femmes", et a rendu hommage à sa fille, pour lui avoir "appris à accepter la joie et ignorer la peur".

David O. Russell a dû en revanche s'incliner pour le trophée de la réalisation, qui est allé au Mexicain Alfonso Cuaron pour le thriller spatial Gravity.
Leonardo DiCaprio a pour sa part remporté le deuxième Golden Globe de sa carrière pour son rôle de Caligula des temps modernes dans Le loup de Wall Street de Martin Scorsese, une plongée hallucinée dans la finance débridée des années 90. "C'est un honneur incroyable. Jamais je n'aurais pensé gagner un Golden Globe dans une comédie", a déclaré l'acteur de 39 ans. "Je dois remercier M. Scorsese. J'ai grandi dans une génération qui a été influencée par votre travail. Merci de m'avoir fait prendre le risque de faire ce film".
Le trophée de la meilleure actrice dramatique est allée à l'Australienne Cate Blanchett pour sa composition saisissante d'une femme aux confins de la folie dans Blue Jasmine de Woody Allen.
Sculpturale dans un fourreau de dentelle noire, l'actrice de 44 ans a remercié son réalisateur: "Merci de m'avoir choisie, au lieu de l'une des autres femmes extraordinaires qui sont dans cette salle ce soir".

Les trophées d'interprétation dramatique masculins sont allés à Matthew McConaughey (acteur principal) et Jared Leto (second rôle) pour leurs rôles de malades du sida luttant contre leur mort annoncée au début de la pandémie, dans Dallas Buyers Club (la critique ici sous peu).
Matthew McConaughey a rappelé que le projet, réalisé par Jean-Marc Vallée, avait été "rejeté 86 fois. Personne ne voulait y mettre le moindre sou".

12 years a slave, qui se profilait pourtant comme l'un des favoris de la soirée, repart finalement avec le seul trophée -- prestigieux au demeurant -- de meilleur drame. Son réalisateur, Steve Mcqueen, s'est déclaré "sous le choc".

Hommage spécial à Woody Allen, absent comme toujours


Les chances françaises se sont quant à elle envolées, La vie d'Adèle d'Abdellatif Kechiche n'ayant pu s'imposer face à La Grande Bellezza de Paolo Sorrentino (Italie) pour le trophée du meilleur film étranger. Et Julie Delpy (Before Midnight) a dû s'incliner face à Amy Adams.
Parmi les autres lauréats, Spike Jonze a remporté le meilleur scénario pour Her (la critique ici sous peu), Disney a décroché le Globe du film d'animation pour la Reine des neiges et Bono l'emblématique chanteur de U2, est reparti avec le Globe de la meilleure chanson ("Ordinary Love", pour Mandela, un long chemin vers la liberté).

Un hommage spécial, pour l'ensemble de sa carrière, a également été rendu à Woody Allen -- absent de la cérémonie, comme à son habitude. Diane Keaton a parlé en son nom et a rappelé la place éminente des femmes dans le cinéma du maître. "Les femmes de Woody ne peuvent pas être mises dans des cases. Elles luttent, aiment, dominent, elles sont drôles et faillibles. Elles sont, au final, la marque de fabrique du travail de Woody", a-t-elle dit.

Côté télévision, les grands gagnants de la soirée sont la série culte Breaking Bad (meilleure série dramatique et meilleur acteur pour Bryan Cranston) et le téléfilm de Steven Soderbergh Ma vie avec Liberace (meilleur téléfilm et meilleur acteur pour Michael Douglas). Michael Douglas, qui interprète Liberace avec un brio déjà récompensé aux Emmy Awards, a salué son partenaire à l'écran, Matt Damon, "l'acteur le plus courageux et le plus talentueux avec lequel (il a) travaillé".

(avec AFP)


mardi 7 janvier 2014

Une présidente pour le 67e Festival de Cannnes


La réalisatrice néo-zélandaise Jane Campion, qui présidera le jury du 67e Festival de Cannes, a bâti son oeuvre sur des portraits de femmes déterminées aux prises avec les carcans de leurs époques. Détentrice d'une double Palme d'or, une performance jamais renouvelée depuis, celle du court métrage pour Peel en 1986, puis du long métrage pour La leçon de piano en 1993, elle devient la première femme réalisatrice présidente du jury. 
Longue silhouette, visage lumineux cerné de longs cheveux gris-blancs, lunettes cerclées noires, la carrière de Jane Campion s'est écrite à Cannes, bien qu'elle soit originaire des antipodes. Jane Campion est née le 30 avril 1954 à Wellington de parents artistes, une mère comédienne, Edith, et un père directeur de théâtre, Richard, fascinés par Shakespeare.
Elle obtient d'abord un diplôme d'anthropologie avant de poursuivre des études de peinture en Angleterre et en Australie. Elle bifurque vers le cinéma dans les années 80 en prenant des cours à l'Australian film television and radio school dont elle sort diplômée en 1984. Son premier court métrage Peel reçoit la Palme d'or en 1986, début d'une longue série de récompenses et d'une carrière fulgurante. Dès son premier long métrage, elle impose un style et une oeuvre, brosser des portraits de femmes en quête d'identité ou d'émancipation.
Sweetie, présenté à Cannes en compétition en 1989, raconte l'histoire d'une jeune femme dont la vie est bouleversée par l'arrivée d'une soeur.
Elle enchaîne avec Un ange à ma table, sur la vie tragique de la romancière Janet Frame, récompensé au Festival de Venise où il obtient le prix spécial du jury en 1990.
La réalisatrice poursuit sa galerie de personnages féminins marginaux dans La leçon de piano qui révèle la comédienne Holly Hunter dans le rôle d'une sourde et muette amoureuse d'un Maori illettré au 19e siècle.

La télévision, 'Nouvelle frontière'

Outre la récompense suprême à Cannes et deux Oscars (meilleur scénario et meilleure actrice), le film récolte une trentaine de prix. "Son oeuvre, traversée de personnages de femmes aussi intenses qu'entravés dans leur épanouissement se décline en de multiples variations", relèvent les organisateurs du Festival de Cannes.
Portrait of a lady en 1996 avec Nicole Kidman, Holy Smoke en 1999 avec Kate Winslet, In the Cut en 2003 avec Meg Ryan et encore Bright Star en 2009 illustrent encore cette appétance pour les rôles de femmes en butte à la norme que les sociétés veulent leur imposer. Ainsi dans Bright Star, en compétition à Cannes, la cinéaste souligne l'opulence de l'univers bourgeois et ses codes puritains, la puissance du désir charnel au fil d'une relation platonique entre le poète romantique John Keats et Fanny Brawne, jeune bourgeoise au caractère indépendant. "Mes films sont des réactions à l'obsession de la société pour la normalité, sa propension à exclure les déviants", racontait en 2010 au Monde Jane Campion passionnée de littérature anglosaxonne romantique avec une prédilection pour Emily Brontë et Emily Dickinson, ou encore Virginia Woolf. 
Personnalité indépendante et anticonformiste, Jane Campion affirmait en 2009 à Cannes vouloir voir plus de femmes cinéastes "parce qu'elles ont donné naissance à la terre entière". "Ce qui intéresse les femmes m'intéresse beaucoup. Tant que les films ne seront pas écrits et tournés par elles, nous n'aurons jamais une vision complète des choses", disait-elle en déplorant la difficulté pour une réalisatrice d'accéder au financement des studios dans une industrie très majoritairement masculine. 
Plus récemment, elle expliquait dans le quotidien britannique The Telegraph son envie de délaisser le cinéma pour la télévision qu'elle qualifiait de "nouvelle frontière"La réalisatrice, qui vit en Australie, vient de connaître un immense succès avec la mini-série télévisée Top of the lake, production americano-australo-britannique. L'héroïne en est une jeune inspectrice qui enquête sur la disparition d'une fillette de douze ans, enceinte, dans une petite ville du sud de la Nouvelle-Zélande. La cinéaste y retrouve Holly Hunter qui incarne une gourou... aux cheveux longs et blancs. Troublante ressemblance...
(AFP)

lundi 6 janvier 2014

The Ryan Initiative : Ca va déménager !

Ancien Marine, Jack Ryan (Chris Pine) est un brillant analyste financier. William Harper (Kevin Costner) le recrute au sein de la CIA pour enquêter sur une organisation financière terroriste. Cachant la nature de cette première mission à sa fiancée (Keira Knightley), Jack Ryan part à Moscou pour rencontrer l’homme d’affaires (Kenneth Branagh) qu’il soupçonne d’être à la tête du complot. Sur place, trahi et livré à lui-même, Jack Ryan réalise qu’il ne peut plus faire confiance à personne. Pas même à ses proches. 

Un reboot musclé 

Après Harrison Ford, Alec Baldwin et Ben Affleck, c'est au tour de Chris Pine d'interpréter le personnage inventé par l'auteur Tom Clancy, sous la direction de Kenneth Branagh, renouant avec les films à gros budget après Thor. Le beau gosse aux yeux bleus est de retour pour un nouveau blockbuster, thriller façon Mission Impossible et Jack Reacher. Il a délaissé le costume de Star Trek pour enfiler celui du bonhomme qui dézingue tout ce qui passe, à qui il arrive une série d'ennuis improbables, qu'il traverse sans jamais sourciller… ou presque. Ici pas de midinette blonde pour le détourner de sa mission comme dans Target, mais une petite amie bien décidée à l'aider, rôle joué par Keira Knightley, qu'on voit peu dans ce genre de film. 

Un premier extrait de 4 minutes vient d'être mis en ligne. Enjoy ! 
(Sortie en France le 29 janvier 2014)


La bande annonce : 

samedi 4 janvier 2014

[Critique] Lovelace : Sur les traces d'une star du porno... malgré elle (08/01/14)

LOVELACE

De Rob Epstein et Jeffrey Friedman
Avec Amanda Seyfried, Peter Sarsgaard, Hank Azaria, Bobby Cannavale, Sharon Stone, Adam Brody, James Franco, Chloë Sevigny, Juno Temple...

Etats-Unis, fin des années 1960. Linda est une adolescente bien sous tout rapport mais en avance sur son temps. Accompagnée d'une copine délurée, elle trouve que ses parents ne lui laissent pas assez de liberté. Entre une mère rigide aux principes religieux immuables et un père qui ne lui dit pas grand chose, elle explose à 20 ans. Malgré sa timidité et sa naïveté, elle tente de vivre sa vie telle qu'elle l'imagine. Elle rencontre Chuck, un homme plus âgé qui lui fait miroiter monts et merveilles, et lui donne cette liberté dont elle rêve. Totalement éprise de cet homme au charisme viril, elle décide de quitter le nid familial pour l'épouser et s'installer avec lui. Manipulateur et appâter par l'argent facile, il incite sa jeune épouse à se laisser filmer lors de leurs ébats amoureux, puis de jouer quelques scènes dans un film pornographique. En 1972, la sortie du film érotique Gorge Profonde fait un tabac et Linda (devenue Lovelace) devient une star unique... mais à quel prix ! La célébrité cache souvent des blessures profondes et des vérités difficiles à entendre.


© Hélios FilmsLe destin de Linda Lovelace aurait dû être un sujet brûlant au vu de la vie de cette starlette "reine de la fellation" sur les plateaux ciné devenue la plus farouche des féministes et tête de proue du mouvement anti-porno au début des années 1980. Mais Rob Epstein et Jeffrey Friedman ont préféré concentrer leur biopic sur la relation toxique et destructrice que Linda entretenait avec son mari, et les sévices qu'il lui faisait subir. Donnant à l'ensemble une version superficielle, à la limite du voyeurisme, d'un parcours pourtant fascinant. Dommage. On aurait préféré voir la reconstruction de l'actrice écorchée et son combat contre les violences conjugales et l'industrie pornographique. 

© STUDIOCANAL Home EntertainmentSi la forme peut s'avérer un temps soit peu originale, il faut surtout retenir l'interprétation des comédiens principaux (et la pléiade d'artistes qui les accompagnent, dont la méconnaissable Sharon Stone). Un temps attribué à Olivia Wilde, le rôle de Linda Lovelace sied parfaitement à Amanda Seyfried. Un rôle d'ingénue qu'elle a déjà pratiqué de nombreuses fois (dans le mauvais Chaperon Rouge et dans le moins mauvais Les Misérables), mais jamais aussi approprié. Icône d'une époque à l'avant-garde des starlettes de télé-réalité en quête d'affection, de reconnaissance et de gloire, Linda gobe tout ce qu'on lui raconte, plus par amour que par réelle idiotie. Les moues de Seyfried en fillette vulnérable, ses yeux de biche effarouchée et ses accès de petite fille à qui l'on pardonne tout, contraste parfaitement face à la brutalité terrifiante de Peter Sarsgaard. 

En résumé : Décevant mais parfaitement interprété.

[Critique] Philomena : Crise de foi sauce anglaise au menu (08/01/14)

PHILOMENA


De Stephen Frears
Avec Judi Dench, Steve Coogan, Sophie Kennedy Clark...

1952, en Irlande. La jeune Philomena Lee tombe enceinte alors qu'elle est adolescente. Très vite, elle est envoyée dans un couvent pour que sa grossesse arrive à terme en toute discrétion. Elle y travaille en échange de soins. Elle met au monde un petit garçon qu'elle nomme Anthony. Mais celui-ci est adopté par une famille de riches Américains à l'âge de 3 ans, et contre la volonté de Philomena. Elle vit cette déchirure dans le secret pendant plus de 60 ans, jusqu'à ce qu'elle mette sa fille au courant. Toutes deux décident d'embaucher un ancien reporter à la BBC pour retrouver Anthony. En disgrâce depuis une malencontreuse affaire, le journaliste voit dans cette histoire une manière de faire rebondir sa carrière. Tous deux partent à la pêche aux indices et remontent la piste du fils perdu entre l'Irlande et les Etats-Unis...



© Alex Bailey
En lisant ce synopsis, on pourrait se dire qu'on va sortir les mouchoirs et prendre une dose de Prozac en sortant de la salle. Point du tout ! C'est bien mal connaître le style d'écriture du duo Steve Coogan / Jeff Pope, qui offrent avec Philomena une histoire bouleversante (et tirée de faits réels) sans pathos ni émotion facile, et préférant la chaleur humaine et la vitalité de l'humour. 

Si les derniers longs-métrages de Stephen Frears n'ont pas convaincus (Lady Vegas en particulier), Philomena nous réconcilie avec le réalisateur britannique. Il reprend sa trame fétiche des dissensions sociales, confrontant l'upper class à la classe plus modeste. On pense d'abord à une comédie jouant à fond sur les contraire, à travers des personnages paraissant au premier abord caricaturaux : le journaliste, pur produit cynique et enragé de la high society londonienne, fait face à une modeste citoyenne, venue de la classe ouvrière, férue de romans à l'eau de rose.
© Alex BaileyLe scénario donne lieu à des répliques savoureuses donnant un rythme de comédie fonctionnant parfaitement. Et le duo d'acteurs y est pour beaucoup. Judi Dench, mélange de classe et d'élégance britannique, de force et de profondeurs émotionnelles, et d'une légère virilité acquise en jouant "M" (big boss de James Bond), nous emporte en deux répliques et un sourire. Son regard malicieux et sa sincérité désarmante s'inscrivent sur nos rétines et dans nos cœurs pour un moment. Interprète d'une bigote dont la foi n'est ébranlée par rien, pas même le plus atroce. Elle donne à cette mamie une dimension presque coquine, avec le plus grand naturel. Il faut l'entendre dire des répliques crues sans sourciller et sans être graveleuse pour autant ! Quant à Steve Coogan (peut être un peu plus en retrait), il lui rend bien la pareille avec ses vannes d'une sécheresse drolatique et ses attaques vindicatives permanentes sur la foi et l'Eglise. Un personnage impudent et insolent comme on aime le voir jouer (comme dans le récent, mais râté, A Very English Man)

© Alex BaileyEt puis, le ton se fait plus grave et les échanges et l'opposition plus profonds. La colère noire du journaliste fait face à la mélancolie de cette dame âgée. Ou deux visions du monde qui s'affrontent sur fond de crise de foi. Mais jamais le cinéaste ne prend parti, ni ne donne de leçon. Il n'est pas là pour manipuler ou juger le spectateur, mais pour questionner chacun sur son attachement à sa foi, malgré les fautes (les horreurs, même) et les contradictions de l'Eglise catholique bien pensante. Là où certains s'énervent et ne veulent pas pardonner car ils ne comprennent pas, d'autres préfèrent continuer à croire et refusent toute rancune et animosité.

En résumé : Philomena s'avère être un petit bijou d'émotions sincères et d'humour so British, porté par des acteurs fabuleux, sans pour autant oublier de dénoncer un propos sérieux et horrifiant.



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