lundi 6 avril 2015

[Critique] Dark places : labyrinthe psychologique trop facile (08/04/15)

© Mars Distribution
DARK PLACES

De Gilles Paquet Brenner
Avec Charlize Theron, Nicolas Hoult, Chloé Moretz, Corey Stoll, Tye Sheridan, Christina Hendricks…

Sortie 8 avril 2015


En 1985, Libby Day a 8 ans. Un âge auquel aucun ne devrait être confronté à la violence, et encore moins aux meurtres de sa mère et de ses deux sœurs. Pétrifiée par la peur et déboussolée, elle désigne son grand frère comme étant le coupable, une accusation facile au vu des circonstances qui l'accusent. 30 ans plus tard, Libby est contactée par le Kill Club, un groupe d'enquêteurs amateurs qui la convainc de se replonger dans ses souvenirs pour faire émerger de nouvelles hypothèses concernant cette sordide affaire, et la possible innocence de son frère. Sans le sou et paumée, Libby accepte contre de l'argent d'ouvrir la boite de Pandore…


© Mars DistributionGillian Flynn, l'auteure du déstabilisant Gone Girl, est une fois de pus adaptée sur grand écran avec son troisième roman Dark Places. Mais contrairement à David Fincher, la réalisation du Français Paquet-Brenner n'est pas à la hauteur du maître. Si comme Fincher, il reprend la chronologie montée en flash-backs récurrents entre aujourd'hui et la période où les meurtres ont eu lieu, le résultat est un peu classique, sans prétexte de perspective subjective de l'héroïne, puisque pas de journal intime comme dans Gone Girl.  Dark places devient une partition où la mécanique de l'effet est trop visible, une mise en scène arythmique et une intrigue alambiquée trop prévisible, sans que les coupables surprennent. Mais là où le bât blesse vraiment, c'est lorsque le scénario part sur les traces du réalisme social, qui s'enfonce rapidement dans le mièvre, sonnant creux. N'est pas Ken Loach qui veut ! Le réalisateur s'embourbe avec maladresse dans une Amérique redneck loin du rêve américain, détruite par les problèmes d'argent, d'alcool et de violence. Et là, tous les clichés sont présents : les esprits étroits au point de sacrifier des ados sur l'autel du satanisme (accusés à tort ou à raison ?) sous prétexte de rumeurs et du manque d'instruction, la bourgeoisie qui montre du doigt les pauvres comme des pestiférés, les dealeurs en manque qui viennent perturber leur ex-famille histoire de mettre un peu le bazar… Résultat : un scénario pourtant pas si malhabile au départ, se prenant au sérieux, très premier degré sans un gramme de recul nécessaire, et avec un final à la limite de la série B.

© Mars Distribution
© Mars DistributionPour réhausser ce thriller psychologique un peu formel, on compte sur l'étonnante Charlize Theron qui, en général, assure plutôt bien ses transformations (qui lui ont fait gagner un Oscar pour Monster). Si son jeu est captivant, on sent tout de même le manque de naturel et d'authenticité dans ce changement de peau. Passant de la sublime créature égérie pour Dior à la fille désargentée, au t-shirt troué, au jean plus que cradingue, l'ensemble souligné par une tête de 3 pieds de long cachée par une casquette, genre "j'ai vécu l'enfer, foutez-moi la paix"… Pourquoi pas ! On a envie d'y croire, mais… tout ça fait un peu calculé. Et pourtant, c'est finalement celle qui nous prend par la main et ne nous la lâche qu'à la fin (un petit peu avant, pour être franche…). 
Malgré tout cela, on se laisse embarquer, et finalement, les plus vrais et fascinants sont les acteurs jouant le rôle du frère incriminé, Tye Sheridan (Mud, Joe) et Corey Stroll (House of cards, The Strains). Sans tomber dans le spoiler, ces hommes qu'on accable de tous les maux essaient de faire de leur mieux pour plaire à leurs femmes (mère, soeurs…), alors qu'on les rabaisse en permanence. L'auteure de Gone Girl a de la suite dans les idées, car une fois de plus, l'homme n'est pas ce qu'il paraît au départ…

En résumé : Pas aussi poisseux qu'on n'aurait pu l'imaginer au vu du synopsis, Dark places est glacé et parfois glaçant mais ne parvient pas à convaincre complètement de son authenticité.

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