jeudi 16 octobre 2014

[Critique] La légende de Manolo : Une fiesta visuelle et émotionnelle (22/10/14)

La legende de Manolo © 20th Century Fox
LA LEGENDE DE MANOLO 

De Jorge Gutierrez
Avec les voix de Zoe Saldana, Channing Tatum, Diego Luna, Ice Cube…

Sortie le 22 octobre 2014

Il était une fois… une légende mexicaine perpétrée depuis la nuit des temps. Le jour de la Fête des morts, l'une des plus importantes d'Amérique du sud et du Mexique en particulier, les esprits passent d'un monde à l'autre. Dans le village de San Angel, Manolo, Joaquin et Maria sont les meilleurs amis du monde depuis qu'ils sont tous petits. Mais leur relation a pris fin lorsque Maria est envoyée en Europe pour y apprendre les bonnes manières car son père la trouve trop rebelle. Pendant ce temps, Joaquin rejoint les rangs de l'armée et devient le justicier invincible (ou presque), tandis que Manolo apprend le métier de torero, comme le veut la tradition familiale ancestrale. La demoiselle revient et les ses deux prétendants vont tout mettre en oeuvre pour la conquérir. C'est le jour de la Fête des morts que le couple de divinités la Muerte et son mari Xibalba font un pari aux enjeux des plus élevés : savoir qui régnera sur le monde merveilleux des Âmes Chéries (non oubliées), que la Muerte dirige avec félicité jusqu'à présent.




La legende de Manolo © 20th Century FoxLa légende de Manolo s'impose comme un ovni dans le petit monde de l'animation, tout en contradictions. Pour contenter les bout d'choux, l'histoire est plutôt simple, les messages clairs et déjà entendus des centaines de fois (sois toi-même pour y arriver, affronte tes peurs, rebelle-toi contre l'avenir que tes parents t'ont tracé sans te demander ton avis, "t'inquiète, tes parents seront toujours fiers de toi quoique tu fasses"…). Mais Jorge Gutierrez a trouvé une façon de le dire diablement efficace :  dans un univers remplie de dingueries, avec pour toile de fond un contexte et une tradition peu ou mal connue du grand public non-Mexicain et terriblement adulte ! Comment expliquer aux tous petits sans devenir morbide que, selon les croyances mexicaines, il existe un monde où les âmes des proches disparus vivent encore car on pensent à eux ?! Fastoche ! Gutierrez nous emballe ça dans un monde chaleureux, coloré, festif, réjouissant. Un univers qu'on a déjà vu chez Tim Burton dans Les Noces Funèbres, où le monde des morts est plus joyeux et coloré que celui des vivants. Mais passons... L'humour est partout, tant dans des petits animaux farfelus que dans des personnages décalés mais toujours en rapport avec la magie du thème principal. 

La legende de Manolo © 20th Century FoxCe que propose Jorge Gutierez est loin de l'imagerie consensuel et du lissé habituels présentés par les grands studios leaders du genre (même si on se laisse fasciner par les prouesses techniques de Disney Pixar et autre Dreamworks). Dans La Légende de Manolo, la magie est partout et ne paraît pas anormale. Tout parait assemblé de bric et de broc, pour un résultat composite un peu barré, où les personnages ressemblent à des marionnettes de bois (aurait-il voulu faire son long-métrage en stop-motion au départ ?), aux proportions surréalistes. Les adeptes d'art pictural retrouveront les multiples influences des grands peintres et sculpteurs tels que Botero, Picasso, Dali, Goya, et les Mexicains (évidemment) Diego Rivera et Frida Kalho. On sent que le réalisateur aime l'art mexicain et veut le faire partager, parfois même de façon détournée, avec un humour qui fait mouche, comme ces reprises latinas improbables de "Creep" de Radiohead ou encore de Rod Stewart. On se régale !

La legende de Manolo © 20th Century FoxLe scénario défile, les gags s'enchaînent et les situations se dénouent de façon un peu trop évidente, mais qu'importe. Le plaisir est là. Seuls quelques thèmes sont sous développés. Si l'histoire amoureuse n'est finalement qu'un prétexte (et ça n'est pas plus mal), on aurait pu voir approfondir le territoire émotionnel de la perte d'un proche, ou encore le poids des attentes de ses parents, trop vaguement exploré. Thème que le grand Guillermo del Toro, producteur du film, connaît parfaitement, lui, qui a traité de la mortalité et des cauchemars à de nombreuses reprises. Reste que les visuels nous embarquent en un clin d'œil, les personnages sont attachants, et on découvre une culture bien peu représentée dans une industrie qui se veut fédératrice et prudente.

En résumé : un vrai feu d'artifice visuel original, et un tas de références finalement plutôt à destination des adultes. Mais les enfants rigoleront aussi grâce aux personnages hauts en couleur.

               

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