samedi 29 décembre 2012

Critique : L'Homme qui rit : une adaptation sans chaleur

L'HOMME QUI RIT
De Jean-Pierre Améris
Avec Marc-André Grondin, Gérard Depardieu, Christa Théret...

Lors d'une nuit d'hiver glacial, un forain herboriste du nom d'Ursus recueille dans sa minuscule roulotte deux enfants qui ont l'air abandonnés : Déa, petite fille blonde et pétillante, et Gwynplaine, garçon défiguré d'un bout des lèvres à l'autre. Un peu bourru mais loin d'être bête, Ursus met en scène un numéro en voyant ses deux protégés jouer. "L'homme qui rit" est né. De villages en villes, le trio se donne en spectacle avec des saynètes inspirées de leur quotidien. Leur succès est tel que même la noblesse commence à s'intéresser d'un peu plus près à celui qui marque les esprits par sa différence. Mais cet intérêt soudain va faire vaciller l'harmonie du trio...

Un théâtre ennuyeux
© Thierry Valletoux / Incognita / Europacorp
Adapter un classique n'est vraiment pas chose aisée, tant la tâche s'avère fastidieuse et souvent risquée. D'autant plus lorsqu'il s'agit de Victor Hugo et de L'Homme qui rit, l'une des œuvres philosophiques les plus denses de l'écrivain ! C'était sans compter l'attachement particulier de Jean-Pierre Améris au texte. Lui qui s'attache à défendre les gens différents ou faibles, à les rendre beaux et forts lorsqu'ils sont diminués ou peu confiants (Les Emotifs anonymes, Mauvaises fréquentations, Poids Léger) a pris le parti de raconter une histoire humaine où l'apparence physique est une valeur bien subjective.

© Thierry Valletoux / Incognita / Europacorp
Là où le roman insiste sur le contexte historique, Améris préfère le laisser en filigrane pour ne se concentrer que sur les relations entre les personnages et leur "handicap" : la cessité de Déa, la balafre de Gwynplaine et l'insensibilité des hautes sphères de la noblesse. Si les propos sont d'une actualité incontestable, les moyens de les distiller sont grossiers et martelés à coups de burin. Le résultat ? Une fresque baroque transformée en bonbonnière artificielle, où tout fait cheap et très kitsch, dans laquelle essaient d'exister des acteurs en mode automatique et peu convaincants. A l'exception peut-être de Marc-André Grondin, plus incarné dans son rôle d'amoureux transi et de tribun enflammé.

© Thierry Valletoux / Incognita / Europacorp
Malgré tout, les décors finissent par donner une identité visuelle assumée (mélangeant la noirceur de Tim Burton et la folie démesurée de Terry Gilliam) mettant en valeur des personnages symboliques forts, même s'ils sont peu subtiles en forme de métaphores emphatiques. Finalement avec le temps, un certain charme opère et on se laisse emporter, bon gré mal gré. On regrettera tout de même la scène finale qui n'est pas sans rappeler la prestation contestée de Marion Cotillard dans The Dark Knight Rises.

© Thierry Valletoux / Incognita / Europacorp



En résumé : Un scénario cliché rehaussé par une esthétique qui l'est encore plus, L'Homme qui rit est une adaptation pas complètement râtée mais qui laisse un goût amer et des yeux abîmés...

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