HORNS
D'Alexandre Aja
Avec Daniel Radcliffe, Juno Temple, Max Minghella, Joe Anderson...
Ig Parish est accusé du meurtre de sa petite amie Merrin. Seul contre tous, mais un atout original dans la poche, où plutôt sur la tête : des cornes. Cadeau du ciel ou poison de l'Enfer, celles-ci obligent tous ceux qui lui parlent à lui dire leurs secrets les plus inavouables. Il va se servir de ce nouveau "pouvoir" pour trouver le véritable assassin de l'amour de sa vie.
"Il faut choisir le péché avec lequel on peut vivre"
Avec
Horns,
Alexandra Aja et Daniel Radcliffe sortent de leur zone de confort. L'acteur a définitivement remisé au placard le costume du magicien pour devenu un acteur à part entière. Il
n'hésite pas à casser son image de jeune premier en devenant un alcoolique patenté, prêt au mal pour faire sortir la vérité. Quant au réalisateur, connu pour ses films horrifiques ou grand-guignolesques,
il essaie une nouvelle approche pour son 6e long-métrage. Le résultat ?
Un conte fantastique hybride mélangeant de nombreux registres, qui vont du thriller à la satire, du tragique à la comédie romantique, sans oublier la cruauté avec sa patte
trash. Cette drôle de mixture donne à
Horns une
imagerie audacieuse, une identité marquée et bien à lui, qui démarre dès les premiers plans. Mais si les scènes s'enchaînent sans que le spectateur sache vraiment où il va et ce qui va en ressortir,
la réalisation s'assagit peu à peu pour devenir plus classique. Il réussit tout de même à créer
un climat entre réalisme et fantastique, avec une imagerie tantôt conte de fée symbolique, tantôt Amérique profonde.
Intéressant et déroutant tout de même car cette variété de registres, si elle est souvent jouissive et drôle, elle a tendance à neutraliser les intentions dramatiques de départ d'une même scène. Ce trip satanique se dilue dans un scénario finalement trop sage et au final un peu longuet. Pourquoi ? Trop d'explications, trop de prévisibilité, l'humour sardonique s'évapore, et le pouvoir d'Ig devient plus terre à terre et les symboles religieux plus lourdingues. Aja n'aurait-il plus fait confiance au lyrisme de son sujet jusqu'au bout ?
Adapté d'un roman du fils de Stephen King,
Horns ne dépeint pas le parcours habituel d'un homme dévoré par la peine, voulant se venger après avoir trouvé le coupable de la mort de sa bien-aimée. Il va bien au-delà.
Jouant avec les symboles divins (parfois de façon trop didactique d'ailleurs), Aja ne propose pas à son personnage principal de devenir un justicier héroïque, d'avoir le beau rôle à la fin. On le sait, les méchants ne gagnent jamais. Ig ne pactise pas non plus avec le Diable, mais il prend conscience que
s'il ne se dresse pas contre l'injustice qui l'accable, son âme sera perdu à jamais. Et tant pis s'il doit devenir le pire des pêcheurs pour s'en sortir. Le film s'ouvre d'ailleurs sur une citation du
Paradis Perdu de Milton,
"Réveillez-vous, levez-vous ou soyez pour l'éternité déchus". Un enjeu dramatique exposé dès les premières images, avec pour bande sonore
Heroes de David Bowie. Daniel Radcliffe y apparaît plus mâle (Malin ?) et viril (et sexy ?) que jamais, sans oublier de garder son regard mélancolique d'homme sur qui le ciel vient de tomber.
Radcliffe livre ici une prestation remarquable, entre rage et tendresse. Son duo avec Juno Temple est plus qu'une évidence à l'écran et fait vibrer le spectateur le plus endurci. Et le voir se transformer en monstre furieux et implacable lui rend enfin justice face aux critiques qui ne le disaient pas véritablement acteur. J'avoue, j'étais de ceux-là. Il n'y a que les idiots qui ne changent pas d'avis !
En résumé : Bonne surprise. Bon trip. Un peu brouillon mais on se laisse avoir. A regarder avec un esprit ouvert à toutes les possibilités.