mercredi 4 septembre 2013

Interview : Pascal Plisson parle du docu. Sur le chemin de l'école (25/09/13)

SUR LE CHEMIN DE L'ÉCOLE 
De Pascal Plisson
(sortie le 25/09/13)


Jackson, Zahira, Carlito et Samuel sont des enfants comme les autres. Ils ont des parents qui les aiment, des copains avec qui jouer. Et entre deux jeux et tâches pour aider leurs parents, ils vont à l'école. Sauf que pour eux, le chemin pour y parvenir est un véritable défi : ils font de très nombreux kilomètres, le plus souvent à pieds, pour y arriver. Et parfois, ils risquent même leur vie sur le chemin ! 
Pascal Plisson, le réalisateur de ce documentaire époustouflant, dépeint avec vérité et des images fortes (et sublimes), le très long parcours que ces gamins très attachants font régulièrement pour aller étudier. Il en a parlé avec ferveur à TvCinephages.





Envie d'une autre vie


© Winds / E. Guionet
« Je vais souvent en Afrique faire des reportages. J’ai eu l’idée de faire ce film alors que j'étais en repérage pour un autre documentaire au Kenya. Quand tout à coup, j’ai vu un enfant marchant seul, au milieu de la savane. Il n’avait qu’une ardoise, une craie et un stylo. En lui demandant ce qu’il faisait-là, il m’a dit qu’il se rendait à l’école. Et qu’il était ravi d’y aller. Chose étonnante, non pas parce qu'il me parlait de l'école avec envie, mais parce que l'école ne fait pas partie de la culture traditionnelle de ces peuples qui vivent au milieu de nulle part. Cet enfant, prénommé Jackson, m'a expliqué qu'il courait chaque jour plus de 3h avec sa sœur, pour se rendre en classe. Il ne voulait surtout pas devenir guerrier comme ses proches. De retour en France, j'ai su que je tenais quelque chose de fort. »

A la recherche de coups de cœur


© Winds / E. Guionet
« Une fois le projet lancé (après l'accord avec Disney, ndlr), mon équipe et moi avons cherché pendant 6 mois des enfants comme celui-là. A travers tous nos contacts de  l'association Aide et Action, d'autres journalistes, des bénévoles des réseaux associatifs qu'on avait appelés pour d'autres films, on a fini par trouver des gens "accro" à notre idée. Après avoir trouvé Jackson en faisant le tour des écoles kenyanes  un producteur indien m'a parlé de la famille de Samuel, seule famille chrétienne dans un village musulman, en Inde. Son histoire avait fait l'objet d'un petit article dans le journal de Bombay. Finalement, on est rentré avec plus de 60 histoires à raconter. Et on a eu de vrais coups de cœur !  Finalement, le plus dur a été de faire des choix, souvent très douloureux. Parfois, ce sont les lieux lors de nos repérages qui ont conditionné nos histoires. En Chine, on avait envie de parler d'un petit garçon en fauteuil roulant, qui ne pouvait pas aller à l'école facilement à cause de l'état déplorable de la route. Mais le temps qu'on revienne pour tourner avec lui, les autorités locales avaient déjà entendu parler de notre projet, et elles avaient régler le problème ! »

Garder la spontanéité


© Senator Filmverleih « Tourner avec des enfants n'est pas ce qu'il y a de plus évident. Ils sont imprévisibles et ils ne savent pas ce qu'est un film. Ils ne réalisaient pas trop ce qu'il se passait. Chaque portrait a été tourné en 12 jours, avec beaucoup de prises. Mais on avait anticipé cela pendant les repérages. On ne leur a pas montré les images au fur et à mesure pour ne pas leur enlever leur naturel (erreur que j'avais faite avec des guerriers Massaï lors d'un précédent tournage). Et comme les gamins portent toujours le même uniforme, on a l'impression que tout a été filmé en une seule fois. »

© Senator Filmverleih

Une maturité incroyable


« Ce qui m'a le plus frappé est que ces enfants ont compris qu’ils n’avaient que l’école pour s’en sortir et vivre mieux. Ils sont fiers, déterminés et solidaires les uns des autres. Ce ne sont que des enfants, mais ils réfléchissent déjà comme des adultes. Ils ont une maturité impressionnante. » 

À l'affût du moindre bruit


© Winds / E. Guionet« Jackson cavale tout le temps. On a fait plusieurs fois le trajet avec lui, et on a fini par anticiper ses chemins. Mais il en changeait régulièrement à cause du danger. Il nous est arrivé de faire des rencontres terrifiantes comme des bandes armées - qu'on ne montre pas dans le film car je ne voulais pas en rajouter. Jackson est à l’affût du moindre bruit ou mouvement dans la savane - à cause des éléphants, girafes et autres bestioles du genre. Mais il préfère risquer sa vie plutôt que de vivre comme ses parents. Au moment de dérusher, le traducteur nous a éclairé sur la discussion que Jackson a avec sa petite sœur. Elle était beaucoup plus instructive sur la façon de tracer leur chemin pour éviter , que de mettre en voix-off un texte à nous. Résultat, on a enlever toute la voix-off en fil rouge, et c'est beaucoup mieux comme ça !  On en apprend bien plus... »

Impensable de manquer l'école


© Winds / E. Guionet« Chose incroyable aussi : Carlito, lui, ne voulait pas faire le film car il devait manquer des jours de classe. Chose impossible pour lui ! Pour le convaincre de faire le film avec nous, la directrice de son école lui a dit de considérer la chose comme un devoir scolaire pour aider ses copains. Chose qu'il a pris à cœur de faire par la suite. »

Garder contact


© Senator Filmverleih « Depuis le tournage, on a gardé contact avec les enfants, comme des parrains. Comme on ne pouvait pas payer les enfants, on a fourni des affaires pour l'école (des bancs, des chaises...) ou pour la communauté à la place. Et grâce à nous, Jackson a pu aller voir la mer  pour la première fois à Mombasa avec l'école car il lui manquait 15 euros pour y aller. À Samuel, on a donné un nouveau fauteuil roulant tout neuf. Mais il ne l'a pas utilisé longtemps, car le sien (qui n'en est pas un) est bien plus solide et qu'il le préférait parce plus approprié pour le chemin qu'il prend ! (rire) On va essayer d'y retourner pour leur projeter le film. »



LEUR PORTRAIT  (cliquez sur l'image pour l'agrandir)



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