O2. Une simple lettre et un chiffre banal pour désigner un élément décisif dans la survie de la plupart des êtres vivants sur Terre : l'oxygène. Tellement capital que le jeune réalisateur flamand Hans Van Nuffel lui donne la part belle dans le film Oxygène (Adem, en version originale). Non pas en tant que symbole chimique naturel, mais comme synonyme de liberté, d'espoir et d'envie de vivre. Pour son premier long métrage, il a choisi de parler de la mucoviscidose. Cette maladie qui ronge les poumons à petit feu, et dont l'issue laisse peu d'espoir. Le sujet a de quoi faire peur, mais le film n’est pas une longue 
lamentation sur la maladie, mais bien plus un film de résistance. Le récit propose le portrait d'un adolescent qui, confronté à la mort, 
passe du morveux qui grille sa vie au jeune adulte rattrapé par sa 
conscience et obsédé par ce qu'il va laisser aux autres. De quoi ça parle ?
Faire un film sur la mucoviscidose, c’est prendre le risque de se passer 
d’un potentiel public peu enclin à parler des sujets difficiles. C'est aussi prendre le risque de tomber dans la facilité du pathos, du misérabilisme et des violons moralisateurs. Mais ici, rien de tout cela. Hans 
Van Nuffel filme des hommes et des femmes en lutte permanente contre un 
ennemi invisible et impossible à battre, mais sans tomber dans ces travers, et nous livre avec subtilité sa version d'un combat bouleversant et plein d'espoir. Un véritable cri d'amour à la vie.
Les personnages mènent une vie ponctuée de séjours 
hospitaliers, mais ils tentent tous de se construire un avenir à plus ou moins long terme selon le caractère de chacun. Le tic-tac de la Faucheuse se fait parfois entendre comme un bruit sourd, au loin, telle une menace d’autant 
plus terrible qu’elle est inéluctable (et beaucoup plus proche pour ces 
malades que pour le commun des mortels). Ce qui semble terrible dans ce film, c’est aussi cette impression que 
tout se joue sur des détails, quelques minutes de retard, quelques 
places sur une liste d’attente, quelques degrés de trop, quelques années
 à vivre...
Et pourtant, Tom, Xavier, Eline, Anneleen font le choix de vivre d’une manière la plus "normale" qu’il soit, de profiter d’instants de bonheur, comme le 
partage d’une pizza ou un week-end à la mer. La maladie est toujours 
présente, de manière directe (traitement lourd, décès) ou indirecte (l'enfermement dans un milieu hospitalier), mais elle ne constitue jamais 
le point central du film. Oxygène ne manque pas de faire sourire, voire rire, comme dans cette scène de course-poursuite dans les sous-sols de l'hôpital, ou encore avec cet humour noir qu'ont les protagonistes entre eux au sujet de leur maladie, parfois déconcertant mais qui dédramatise leur situation.
En cela, Oxygène porte un regard pertinent et très émouvant sur la maladie. En réalité, 
on s'émeut autant qu'on rit, peut être justement parce que le film ne 
cherche jamais à enfermer ses personnages dans une condition 
désespérante. Une magnifique image du dépassement et de la condition humaine au delà même de la maladie. Et une formidable histoire d'amour, d'amitiés sous toutes ses formes. Celle entre Tom et Jimmy, un faux voyou qui se la joue viril mais qui répond 
toujours présent lorsqu'il s'agit de son pote malade. Celle entre Tom et Xavier, 
étrange rencontre en milieu hospitalier faite de partage, de vérités et 
de sacrifices réciproques. Et puis la copine de Xavier, prête à 
tout pour avoir un enfant, malgré sa maladie héréditaire... image étrange mais sublime du triomphe de la vie sur la mort. 
En résumé : Oxygène ne peut laisser indifférent. Entre dureté et émotion, et porté par de jeunes acteurs fabuleux (un grand coup de chapeau au jeune Stef Aerts, qui signe là une interprétation toute en finesse), ce film est un petit bijou cinématographique, à qui on pardonne quelques défauts passés sous silence par la beauté des propos.
