samedi 17 décembre 2011

Interview : Andrew Okpeaha MacLean : "Le plus compliqué : faire avec les ours et que personne ne se fasse manger !"

© Memento Films
Premier long métrage d'Andrew Okpeaha MacLean, On the Ice (critique ici)  (sortie le 14 décembre) est une réelle découverte, un long-métrage qui fait du bien au cinéma actuel qui bégaie. On voit à travers ses personnages vrais l'intrusion de la vie réelle avec un fait divers universel sur un territoire hors du temps et singulier, dans une grâce retenue et un dénouement poignant et noble.
Rencontre avec le réalisateur de cet ovni glacé et plein d'émotions.






Pourquoi avoir préféré tourner avec des adolescents plutôt que des adultes ?
J'ai choisi de parler de la jeunesse habitant en Alsaka, de sa culture entre modernité et tradition car je trouve fascinant son évolution actuelle fascinante. Les jeunes forgent leur identité à partir de deux sources : la tradition plusieurs fois centenaires, et en même temps, ils sont connectés à la modernité, la culture urbaine avec le hip-hop et tout ce qui se passe sur Internet. Ils prennent le tout et le mélange avec leur histoire, et ils s'en servent pour exprimer ce qu'ils sont. Il y a beaucoup de fierté chez les gamins d'Alaska, dans leur façon d'être des gens qui habitent dans un milieu extrême. En même temps, ils veulent être connectés au reste du monde.

© Memento Films
Cette histoire vous touche particulièrement...
Je jure que je n'ai tué personne ! (rires) Ca m'est personnel à cause du monde dans lequel l'histoire se passe. J'y ai mes origines. Les personnages sont basés sur des gens que je connais. C'était important pour moi que tout soit "vrai", que cela reflète la réalité, la vraie vie en Antarctique telle que je la perçois. L'histoire n'est pas fondée sur un seul événement en particulier mais sur plusieurs (comme des meurtres et des situations du genre) qui sont arrivées à des gens que j'ai côtoyés. Ils ne se sont pas toujours déroulés comme ça mais... Par exemple, au lycée, il y avait un garçon qui a fini par tuer quelqu'un alors qu'on n'aurait jamais imaginé qu'il puisse être capable de le faire. Accompagné d'un deuxième, il a caché le corps pendant plus d'un an et cela l'a rongé de l'intérieur. Et cette lutte intérieure, je voulais la retranscrire sur une durée beaucoup plus courte. Qalli, qui se retrouve dans cette situation dans le film est face à ce dilemme. Et pourtant, il a tout fait pour que cette violence n'éclate pas. Et il va faire une succession de mauvais choix alors que son but est de protéger son entourage et d'arranger les choses du mieux qu'il peut. Et en fait de vouloir bien faire, il blesse ses proches. Et finalement, tout repose sur la prise de responsabilités et ses conséquences : laisser quelqu'un déjà abîmé par la vie s'accuser à sa place alors qu'on a un avenir brillant tout tracé, ou assumer entièrement et pouvoir se regarder dans une glace.


Comment se sont passés les castings ?
© Memento Films
Tous les acteurs présents dans le film n'avait jamais tourné. J'ai eu envie de cela, et en même temps, je n'ai pas eu d'autre choix. Car il n'y a pas d'acteurs de cet âge en Alaska. Je ne dis pas que je n'aime pas travailler avec des acteurs confirmés, mais il était important d'avoir des gens de ce monde qui comprendraient le sujet. Le producteur et moi avons voyagé dans tout l'Antarctique, le Canada pour voir un maximum de jeunes. On a vu des centaines de gens. Et on en a trouvé dans la rue, dans les supermarchés... C'était un processus long et difficile mais gratifiant. Finalement tous les acteurs viennent d'Alaska, sauf un qui vient du Canada.


Et Josiah Patkotak et Frank Qutuq Irelan se sont tout de suite imposés...
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Ils jouent les personnages principaux. Je les connais depuis longtemps. Josiah je le connais depuis qu'il a 6 ans. Il est tout à fait différent de son personnage : il est très bavard et très drôle ! Il est toujours en train de nous mettre en boite. Une fois lancé, on a du mal à l'arrêter. Donc ça a été un vrai travail pour lui de se concentrer pendant les scènes. Quant à Franck, c'est un super sculpteur sur ivoire. Je suis parti à la chasse avec lui et son capitaine un jour.


Comment travaille-t-on avec des débutants ?
Travailler avec eux a été un véritable challenge, mais c'était le plus intéressant et le meilleur souvenir. Ils sont venus faire des lectures, puis une fois choisis, on a répété durant un mois avant de commencer à tourner, cela a été la clé pour qu'ils soient à l'aise devant les caméras et qu'ils pouvaient raconter l'histoire eux-même.


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L'Antarctique, un environnement très hostile pour un tournage. Comment était-ce ?
On a eu beaucoup de choses à gérer durant le tournage. Le froid était l'une d'entre elles : il faisait entre -25°C et -30°C. Mais on était plutôt bien équipé pour résister. Le plus dur a été de tourner les scènes sur l'océan gelé. Il fallait vérifier les conditions météo en permanence, comme le vent car les glaces pouvaient bouger à n'importe quel moment et nous embarquer vers la Russie. Cela pouvait être dangereux. Alors il fallait prévoir les jours de tournage au coup par coup. De même que la lumière est difficile à gérer car le Soleil ne se couche jamais à la période où on a tourné. Il fallait tout de même créer des ambiances différentes pour chaque période de la journée. Mais le plus compliqué a été de faire avec les ours qui étaient dans les environs et qui étaient attiré par l'odeur de la nourriture. On avait quelqu'un sur le tournage en permanence qui veillait, fusil à la main, à ce que personne ne se fasse manger. Heureusement, ça n'est jamais arrivé ! (rires)


Propos recueillis par Marie, à Paris.



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