LES MARCHES DU POUVOIR
De George Clooney
Avec Ryan Gosling, George Clooney, Philip Seymour Hoffman, Paul Giamatti...
Georges Clooney a définitivement retiré la casquette de playboy de télé pour devenir un réel observateur averti du monde politique. Et c'est tant mieux ! Après
Good Night and Good Luck, il nous livre un thriller efficace et subtilement écrit, dans lequel les hommes s'avèrent être de vrais loups quand il s'agit d'accéder sur la plus haute marche politique.
Les Marches du pouvoir (Ides of March, en VO*) est un petit bijou frontal qui, au lieu se perdre dans le labyrinthe complexe des arcanes de la politique, montre que les politiciens, même les plus droits, succombent aux sirènes de la tentation et de la manipulation pour gagner. Et à quel prix !
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© Sony Pictures |
Stephen Meyers (Ryan Gosling) est un jeune conseiller de campagne du gouverneur Morris (George Clooney), candidat démocrate aux primaires américaines. Idéaliste, il va faire honnêtement tout ce qu'il peut pour mener à bien la campagne de celui qu'il considère comme le meilleur candidat, un homme bon, quasi providentiel. Mais il va vite comprendre que dans la conquête du pouvoir tous les coups sont permis. Face aux manipulations et aux trahisons, il va perdre sa naïveté, changer sa vision des choses et rendre coup pour coup.
A vous de voter
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Adaptation d'une pièce de théâtre s'inspirant de la campagne présidentielle de Howard Dean, candidat démocrate en 2004,
Les marches du pouvoir livre une vision sans concession de la vie politique américaine, où violation de lois, manipulation du processus démocratique, accords passés en coulisse et jeux d'influence sont le lot quotidien des candidats et de leurs conseillers. Aussi difficile qu'il soit de le concevoir, avoir les compétences requises et jouer loyalement ne suffit désormais plus pour accéder aux plus hautes fonctions de l'Etat.
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La force du film ? Sa construction efficace fondée sur de véritables nœuds dramatiques, basés sur des faiblesses humaines compréhensibles par le plus grand nombre. Et sur le destin de ces hommes ballotés comme des pantins à leur insu (ou presque) par ce monde impitoyable, broyeur de conscience et de foi. Peu importe les idées ou les convictions que les candidats défendent, aussi honorables soient-elles, la conquête du pouvoir et son exercice implique de mettre les mains dans le cambouis et souvent de trahir ses principes. Le jeune Stephen l'apprendra à ses dépens. On ne nous révèle rien à ce sujet, mais le scénario avec ses répliques ciselées, fortes et sans manichéisme, nous le jette à la figure sans illusion ni ménagement.
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Cette histoire ne pouvait être portée que par un casting quatre étoiles. A menu : Paul Giamatti (
Sideways,
L'illusionniste,
Il faut sauver le soldat Ryan), Philipp Seymour Hoffman (
The Big Lebowski,
Truman Capote,
Good Morning England), Marisa Tomei (
The Wrestler,
La Défense Lincoln,
Crazy Stupid Love), Jeffrey Wright et Evan Rachel Wood (
True Blood, The Wrestler,
Whatever Works). Pas moins de 3 Oscars et 13 nominations à la statuette, 6 Golden Globes et 23 nominations cumulées. Et qui de mieux que la star montante Ryan Gosling pour jouer ce garçon intelligent et idéaliste que tout le monde veut avoir à ses côtés pour gagner ? Manipulateur manipulé, il ne reste pas grand chose de lui car il finit par vendre son âme. Toujours aussi charismatique et tout en finesse et vulnérabilité, il fait face à un Georges Clooney plus brillant que jamais, qui joue l'ambiguïté entre fascination et cynisme. Mais dans ce dernier registre Paul Giamatti et Philpp Seymour Hoffman ont la palme. Giamatti est le directeur de campagne du camp adverse. Un personnage fabuleux car il assume entièrement le fait d'être un salopard perfide et retors. Pas d'hypocrisie venant de sa part, et c'est finalement celui qui reste le plus fidèle à ses convictions.
En résumé : Un pur moment de cinéma dont il est difficile de décrocher. Réalisateur, producteur, co-scénariste et acteur, George Clooney impose
un style sobre, solide, avec sa touche classique assumée, telle dans les grands classiques des années '70 (
Les Hommes du président, par exemple). À
travers une intrigue aussi fine que réaliste (la réalité étant ce qu'elle est au vu des innombrables scandales qui touchent les hommes politiques, quel que soit le pays),
Les Marches du pouvoir dénonce sans prendre parti le chemin tortueux qui conduit au bureau ovale, aux
commandes du monde… Pas très rassurant !
* Petite note pour ceux qui souhaiteraient en savoir plus sur le titre en version originale : il est tiré de la pièce
Jules César de Shakespeare. Il fait référence à ce que dit un devin à César juste avant son assassinat : "Méfie-toi des idées de Mars".