SEUL CONTRE TOUS
De Peter LandsmanAvec Will Smith, Alec Baldwin, Luke Wilson, Paul Reiser, Gugu MBatha-Raw, Arliss Howard, Arliss Howard, Albert Brooks...
Sortie le 9 mars 2016
Inspirés de faits réels...
Le Dr Bennett Omalu n'est pas un médecin légiste comme les autres. Brillant et original, il a l'étrange habitude de parler aux morts. Il reçoit un jour dans son service le corps de Mike Webster, une ancienne star du football américain menant une vie misérable et ayant en partie perdu la raison. Bennett découvre rapidement que Mike a subi de nombreux traumatismes crâniens, ce qui pourrait expliquer sa santé mentale vacillante. Intrigué, le médecin décide d'enquêter sur les traumatismes subis par d'autres joueurs de football américain, qui s'accumulent sur sa table d'autopsie. Il découvre alors l'encéphalopathie traumatique chronique, une affection du cerveau menant à des traumatismes cérébraux et une dégénérescence des neurones, liée à la pratique professionnelle de sports de contact, tels que le football américain. Malgré des obstacles vertigineux, le médecin a tenu tête à l'une des plus puissantes fédération du monde, la NFL (la ligue professionnelle du football américain) et à de nombreux détracteurs pour faire éclater la vérité et faire taire le pouvoir de l'argent au nom de la vie.
Seul contre tous est un thriller qui s'inspire d'un article du magazine GQ daté de 2009, transformé en livre, écrit par Jeanne Marie Lassas. Il était évident pour le réalisateur Peter Landesman, journaliste d'investigation émérite de s'intéresser à cette histoire hors-norme à la David contre Goliath. L'homme n'en est pas à son premier coup d'essai : il a déjà deux longs-métrages basés sur des histoires vraies à son actif : Parkland autour de l'assassinat de Kennedy, Felt sur le Watergate (prochainement), et il a scénarisé Secret d'État de Michael Cuesta, dans lequel un journaliste veut faire la lumière sur la CIA impliquée dans une vaste machination.
Seul contre tous n'est pas un simple film sur le football. Il va bien plus loin que cela. Et heureusement, car pour fonctionner à l'international, il se devait d'élargir son horizon au-del) du ballon ovale. Il questionne une société qui place un sport comme une institution inébranlable et intouchable, dont le business et l'aura touchent toute une nation et font partie de la culture intrinsèque d'un peuple. Le poil à gratter s'appelle Omalu. En s'attaquant à elle, le médecin se met à dos non seulement tout un pays, mais il doit aussi gérer l'aspect économique et les fondations mêmes de ce sport, dont les intérêts se sont violemment déchainés contre lui.
Landesman s'identifie aux lanceurs d'alerte qui se démènent pour faire sortir la vérité coûte que coûte. Son scénario s'attache au parcours de ce médecin immigré nigérian bardé de diplômes, à la fois excentrique et digne. Il a choisi de raconter cette histoire sous l'angle humain et non purement scientifique. Il dit l'avoir écrit pour Will Smith car lui seul pouvait le jouer comme il l'entendait. On pouvait craindre que l'aura de l'acteur n'écrase son personnage et qu'il n'arrive pas à se faire oublier. Mais l'acteur américain étonne par sa simplicité, voire une innocence, touchante. Il conquiert à nouveau le territoire dramatique après Sept vies et À la poursuite du bonheur avec une grande maîtrise : pour incarner cet idéaliste, il adopte un langage corporel et un accent différent sans pour autant les surjouer.
Si la forme choisie par le réalisateur est très classique (celle d'un biopic hollywoodien dans toute sa splendeur), il enchaîne parfaitement les scènes institutionnelles et celles plus intimes avec pour seul but de rechercher et d'exposer la vérité que la NFL veut cacher à tout prix. Des scènes narratives très chorégraphiées (avec des athlètes sur un grand terrain) et des petites pièces ou les gens sont face à face, cœur à cœur, le tout dans un rythme lent comme pour accentuer la difficulté du Dr Omalu dans sa quête. Reste qu'on retiendra davantage le fond et les questions et les enjeux qu'il soulève : qui de la morale ou du business faut-il sacrifier au nom d'une institution qui fait l'identité d'une nation, comment accepter l'ingérance d'un homme, non-Américain de surcroît, dans le fondement culturel d'un pays, ou encore comment réaliser le rêve américain sans briser ses idéaux sur la dure réalité des enjeux d'une société.
En résumé : Un film pertinent sur le fond mais un peu lisse sur la forme, porté par un Will Smith convaincant (performance saluée par une nomination aux Golden Globes).